Surfacturations et corruption au ministère du Commerce : La présidence met le holà

Après examen d’une note de présentation soumise par Madame la ministre du Commerce, de l’Industrie et des PME « pour accord de signature de conventions relatives à l’estampillage, l’étiquetage des produits et à un projet de centre de technologie, d’inspection et de quarantaine des entrées et sorties de produits marchands en République de Guinée », les instructions du Président Mamadi Doumbouya sont que les ministres du Commerce, de l’Industrie et des PME Loupou Lamah, de l’Économie et de Finances, Moussa Cissé et du Budget, Lanciné Condé, sont invités, « solidairement, à procéder à un examen exhaustif des coûts qui semblent très élevés, aux fin[s] de compte rendu ». 

Au ministère du Commerce, de l'Industrie et des PME, un scandale de surfacturations et de tentative de corruption fait actuellement trembler les hautes sphères du pouvoir. La présidence de la République, alertée par des informations accablantes de la Radio Fim fm https://www.youtube.com/watch?v=cHeQZQvyYm0 (Mirador du 23 novembre 2022 à partir de 2 :12 :51), a décidé d'intervenir et d'exiger des explications. 

Au cœur de cette affaire se trouvent deux personnalités, le Premier ministre Bernard Goumou et la ministre du Commerce de l'industrie et des PME Mme Loupou Lamah, qui semblent être les deux faces d'une même pièce. 

Mais c'est surtout un dossier qui attire l'attention, parce qu’il s’agit de la convention relative à l'estampillage, l'étiquetage des produits, et du projet de centre de technologie, d'inspection et de quarantaine des entrées et sorties de produits marchands en République de Guinée. 

Initialement, la convention était  en cours d’établissement entre l'État guinéen, représenté par le ministère de l'Économie et des Finances, le ministère du Commerce, de l'Industrie et des PME en tant que maître d'ouvrage, et la société Nextan, pour un coût de départ de 15 millions de dollars américains avant la transition.  

Cependant, M. Bernard Goumou, alors Ministre du Commerce, de l'Industrie et des PME, a soumis une proposition de convention lors d'une réunion du conseil des Ministres, fixant le coût à 35 millions de dollars américains, « sans que la moindre procédure réglementaire ne soit respectée », selon une source habituée au dossier de Nextan.  

Ajoutant qu’« aucune justification n'a été apportée pour expliquer cette augmentation de 20 millions de dollars » par rapport au projet initial du gouvernement d’Alpha Condé. Il apparaît clairement, selon un expert, que « les éléments et les activités de cette convention ont été largement surfacturés », conclut cette source. 

Lorsque M. Bernard Goumou est devenu Premier ministre, il a été remplacé brièvement par Madame Rose Pola Pricemou. Cette dernière a été soumise, dit-une source « à une forte pression pour la signature de la convention, ce qu'elle a finalement fait ». Toutes nos tentatives d’avoir le commentaire de la concernée sont restées vaines. 

Cependant, le ministre de l'Économie et des Finances, M. Moussa Cissé a, selon une autre source, bloqué la convention, « créant ainsi un obstacle majeur ». Finalement, « le dossier est revenu au ministère du Commerce, où il devait suivre la procédure régulière » précise une source technique.  

Des sources administratives croient savoir que « Madame Rose Pola Pricemou, ne correspondant pas aux intérêts du Premier ministre Goumou, a été remplacée par Louopou Lamah, qui s'est montrée plus encline à signer et à obéir au chef du gouvernement, malgré les nombreux soupçons de corruption qui pèsent sur la procédure, notamment les accusations de népotisme et de surfacturations concernant la rénovation des locaux du ministère du Commerce ». 

Mais quelles sont les motivations qui poussent M. Bernard Goumou à s'acharner autant pour obtenir la signature de cette convention au Ministère du Commerce ? Peut-être qu’il y aurait un appât à déterrer. Et comme il est de tradition guinéenne que des dirigeants s'offrent des maisons à Dakar au Sénégal ou à Abidjan en Côte d’Ivoire, peut-être que tel n’est pas le cas, dans ce dossier de Nextan. 

Finalement, les deux projets se sont heurtés à la décision sans appel de la Présidence de la République. Dans une lettre du 4 mai 2023, adressée à la Ministre du Commerce, de l'Industrie et des PME avec copie conforme aux Ministres de l'Économie et des Finances, ainsi qu'au Budget, la Présidence de la République a demandé à ce que les coûts exorbitants de ces projets soient examinés de manière exhaustive, en vue d'un rapport détaillé. 

Cette intervention de la Présidence met en évidence l'inquiétude croissante face aux allégations de surfacturations et de corruption qui ébranlent le Ministère du Commerce. Les coûts excessifs de ces projets soulèvent de sérieuses interrogations quant à leur légitimité et à la gestion des fonds publics. 

Interrogé par le www.petitdepute.com, le Premier Ministre Goumou a indiqué ceci : « Je ne suis pas au courant de cette nouvelle. Je viens d’échanger avec le Général Amara qui est surpris autant que moi ». Cependant, ajoute M. Goumou « j’apprécie votre démarche d’aller à la source pour rechercher l’information. Nous allons vous aider à travailler avec le ministre du Commerce. Mme la ministre du Commerce est prête à vous recevoir et vous mettre à disposition toutes les informations concernant le dossier Nextan et à répondre à toutes vos inquiétudes depuis la genèse qui date avant le CNRD à nos jours ». 

Mais notre questionnaire à Madame Loupou Lamah est resté sans réponse, en tout cas jusqu’au moment où nous mettions ce texte en ligne.