Les tours de passe-passe des travaux publics
Pour brasser des gros sous, certaines huiles de l’establishment politico-financier ne manquent pas d’ingéniosité. Comme ces stratagèmes consistant à profiter des plans d’intervention des travaux d’urgence pour glisser de nombreux contrats à prix d’or. De véritables tours de passe-passe, dignes de prestidigitateurs dont les travaux publics servent à beurrer les épinards.
Dans ce volet de notre enquête, trois exemples ont retenu notre attention. Il s’agit notamment du marché n°2015/362/CR, consacré aux travaux prioritaires pour la construction et le bitumage des voies d’accès au Camp militaire Samoroya, dans la préfecture de Kindia, celui de l’Institut Pastoria, situé dans la même commune urbaine et la rectification du virage dangereux de la contournante de RN1 Kindia, d’une longueur de 12 KM. Des marchés aux contours opaques, exécutés par l’entreprise BEGEC travaux GIE.
Dans le lot de ces marchés, nous avons retenu trois échantillons, pour un début. C’est le cas du marché n°2015/362/CR, consacré aux travaux prioritaires pour la construction et le bitumage des voies d’accès au Camp militaire Samoroya, dans la Préfecture de Kindia, celui de l’Institut Pastoria, dans la même commune urbaine et la rectification du virage dangereux de la contournante de RN1 Kindia, sur 12 KM. Des travaux confiés à l’entreprise BEGEC travaux GIE. Une des entreprises qui a pignon dans la cité.
Il y a du mal à comprendre ce qui a motivé cette décision, si ce n’est qu’une question d’intérêt. En effet, c’est par la lettre n° 0554/MTP/CAB/DNVU/2015 en date du 1er juin 2015, que le Ministre des Travaux Publics d’alors, M. Mohamed Traoré, a demandé une autorisation de dérogation à la procédure d’appel d’offres ouverte, pour que la passation de ces marchés précités, se passe par entente directe. En invoquant l’urgence impérieuse liée la remise en état de la route d’accès au camp militaire de Samoroya, celui de l’Institut Pastoria et la rectification du virage dangereux de la contournante de la Route Nationale N°1.
En scrutant des contrats comme celui du marché n° 2017/027/CP portant travaux d’urgence sur l’axe centre émetteur- le pont Kaporo ; le Ministère de l’Éducation nationale- la Route Niger (7ème avenue) ; puis l’ambassade de France-Banque UBA, longue de 8,30 KM, tous raflés par l’entreprise BEGEC travaux GIE, pour une valeur TTC de GNF 50 503 968 594 , on en vient à déceler des failles.
Et selon une source technique, sur l’axe centre émetteur- le pont Kaporo, la partie dégradée ne concerne en fait qu’un court tronçon de l’ordre de 600 m, du rond-point du centre émetteur, au lycée Français, le reste de la route étant en bon état, jusqu’au pont de Kaporo.
Le problème serait que comme le soutient une source liée à ce marché, plusieurs contrats, dont celui-ci, auraient fait l’objet de paiement sans avoir obtenu le visa préalable du contrôleur financier ministériel.
L’autorisation de dérogation à la procédure d’appel d’offres ouvert pour la passation du marché précité, demandée par Mme la ministre des Travaux publics, Oumou Camara, par la lettre n° 0771/MTP/SG/CAB/2016, en date du 19 octobre 2016 vient confirmer ce constat.
Il était finalement question que ledit marché soit passé par entente directe, au titre de l’article 37 du CMP dans le cadre de la mise en œuvre du « plan d’intervention des travaux d’urgence pour la réhabilitation des infrastructures routières », en invoquant « le niveau de dégradation avancé de certains axes routiers » nécessitant « d’intervenir assez rapidement sur les principaux axes routiers ».
C’est ce qui ressort de notre enquête. Si l’on s’en tient à la lettre réponse n° 093/MEF/CAB/2016 du 21 octobre 2016, de la Ministre de l’Économie et des Finances, Mme Malado Kaba, qui avait, répondu favorablement à la demande de dérogation, sans viser explicitement l’avis de non-objection l’ACGP.
Quand on prend les deux marchés de BEGEC mentionnés-ci haut, le motif présumé de l’urgence impérieuse invoqué par les Pouvoirs Publics ne semble pas répondre aux conditions fixées à l’article à l’article 11, alinéa 4 de la loi du 11 octobre 2012, précitées et aux articles 37 et 38 du Code des Marchés Publics et de la Délégation de Services Publics.
Des conditions qui relèvent que la procédure d’entente directe a été conçue comme une procédure exceptionnelle dans les textes récents, régissant les marchés publics avec des conditions à réunir qui en limitent le recours. Or le nombre très élevé de marchés par entente directe passés par les administrations et l’interprétation peu rigoureuse de la condition d’urgence dans certains d’entre-elles, concourent à observer que cette procédure est souvent utilisée par commodité pour s’affranchir des règles de droit commun.
Notons bien que BEGEC dispose en plus du contrat N°2014/036/N portant travaux de construction et de bitumage de la zone nord de la voierie urbaine de Conakry, le contrat N°2014/254/N consacré aux travaux de construction et de réhabilitation de 10,6 km de voirie dans la ville de Gueckédou, dans le sud-est de la Guinée, pour un montant TTC de GNF 103 139 870 600.