Perspective de crise budgétaire en Guinée : Pressions sur les compagnies minières et les entreprises privées
Dans le cadre de la mobilisation des ressources internes pour réduire le déficit budgétaire, les autorités fiscales et judiciaires guinéennes intensifient leurs actions à l’égard des compagnies minières et des entreprises privées. Sous la pression de l’Agence judiciaire de l’État, plusieurs sièges de compagnies minières ont été fermés, tandis que les membres de la Confédération générale des entreprises de Guinée (CGEG) rencontrent des difficultés à se conformer aux obligations fiscales.
Face à cette situation, la Chambre des Mines de Guinée, organisation représentant les investisseurs miniers, a adressé une correspondance le 10 janvier 2025 à Me Mohamed Sampil, Agent judiciaire de l’État. Elle sollicite la réouverture des bureaux fermés par les autorités, soulignant que le litige porte sur l’application des redevances liées au Bordereau électronique de suivi des cargaisons (BESC), réclamées par le Conseil guinéen des chargeurs (CGC).
Selon la Chambre des Mines, cette mesure est perçue comme une violation des conventions de stabilisation fiscale et parafiscale en vigueur. Ismaël Diakité, président de la Chambre des Mines, a indiqué que l’organisation propose une révision de l’arrêté ministériel instituant la redevance. La nouvelle tarification suggérée par les sociétés minières prévoit un calcul basé sur le Bordereau de livraison par navire ou par lot de 100 000 tonnes, comme cela se pratique dans d’autres pays de la sous-région, au lieu de l’actuelle tarification de 0,15 USD par tonne métrique.
Le ministère des Mines et de la Géologie a soutenu cette initiative dans une lettre datée du 15 janvier 2025, adressée à l’Agence judiciaire de l’État. Aboubacar Kourouma, secrétaire général du ministère, a demandé une prolongation du moratoire jusqu’au 31 janvier 2025 et la réouverture des bureaux fermés afin de permettre des discussions dans un climat apaisé.
Parallèlement, la CGEG a sollicité un moratoire pour le paiement de l’Impôt minimum forfaitaire (IMF) de l’exercice 2025. Dans une lettre du 15 janvier adressée à Madame Fatoumata Foula Diallo, nouvelle directrice générale par intérim des impôts, Ansoumane Kaba, président de la CGEG, a également attiré l’attention du Premier ministre Bah Oury et du ministre du Budget Facinet Sylla sur les difficultés liées au renouvellement des certificats d’immatriculation fiscale via la plateforme eTax.
Ces obstacles, combinés aux problèmes techniques de la plateforme, retardent le respect des obligations fiscales et pénalisent les activités économiques des entreprises. La CGEG propose un moratoire exceptionnel de trois mois pour le paiement de l’IMF, afin de permettre une transition fluide et une meilleure adaptation au système eTax.
Dans le but d’augmenter les recettes de l’État, le Conseil national de transition (CNT) a recommandé en novembre 2024, lors de la dernière session budgétaire, que l’administration publique redynamise la “Task Force Mines Revenues” et tous les autres cadres de concertation pour les secteurs générateurs de revenus, afin de maximiser la mobilisation des ressources. Le CNT préconise également la révision des conventions minières, notamment en ce qui concerne les exonérations jugées abusives.
La situation actuelle met en lumière les tensions entre les exigences de mobilisation des ressources de l’État et les revendications des acteurs économiques. Tandis que les compagnies minières contestent la légitimité de certaines redevances, les entreprises privées demandent un sursis pour se conformer aux nouvelles exigences fiscales. Le dialogue entre les parties sera déterminant pour préserver le climat des affaires et encourager les investissements dans le pays.