Situation des finances publiques guinéennes en 2021

La Guinée est confrontée à des problèmes budgétaires. Alors que le pays souhaite maintenir son besoin de financement (déficit budgétaire) en dessous de 2,7% du Produit Intérieur Brut (PIB). En voici ce qui expliquerait la décision de l’ancien Premier Ministre Guinéen, de prôner « une revue des exonérations accordées aux entreprises minières, notamment celles concernant les conventions postérieures à la réforme du code minier (2013), pour s’assurer de leur conformité audit code reformé ». Interrogé le 14 juillet 2021 par la radio locale FIM fm, le Ministre du Budget, Ismaël Dioubaté a confirmé la ferme décision du gouvernement d’Ibrahima Kassory Fofana, à organiser avec l’appui de la Banque Africaine de Développement (BAD) un audit fiscal des compagnies minières afin de s’assurer que celles-ci payent correctement les impôts.
En plus, le gouvernement a mis en place un nouveau Code Général des impôts (CGI), pour définir un cadre juridique et fiscal plus clair et transparent et une amélioration du climat des affaires, tout en renforçant de manière significative les pouvoirs de contrôle de la Direction Nationale des Impôts.
D’une manière générale, l’imposition des revenus a été révisée dans le sens d’une exigence par revenus catégoriels et d’une suppression de l’impôt général sur le revenu. Cependant la suppression de l’impôt général sur le revenu n’entraînera a priori pas de pertes de recettes.
Dans ce nouveau code général des impôts, les notions de résidence fiscale des personnes physiques ou morales et de lieu d’imposition des revenus ont été précisées. C’est-à-dire que les impôts sur le revenu sont appliqués sur la base mondiale. Autrement dit, les personnes qui ont leur résidence fiscale en Guinée sont imposable dans ce pays à raison de l’ensemble de leurs revenus qu’ils soient de source guinéenne ou étrangère. Toutefois, par exception, les impôts sur les bénéfices sont appliqués sur une base territoriale, c’est-à-dire que, seuls les bénéfices réalisés en Guinée par une entreprise résidente ou un établissement stable sont imposés en Guinée.
Sur le volet des matières premières, les règles en matière de prix de transfert ont été modernisées : (i) un nouveau dispositif en matière de lutte contre les transferts indirects de bénéfices est prévu à l’article 117, (ii) le seuil du chiffre d’affaires prévu à l’article 117 au-dessous duquel les entreprises doivent tenir une documentation en matière de prix de transfert a été relevé à GNF 1000 Milliards. En outre il a été ajouté une obligation de produire une déclaration simplifiée de leur politique de prix de transfert pour les entreprises liées établies en Guinée, y compris pour les entreprises en dessous du seuil indiqué ci-haut non soumises à l’obligation documentaire de droit commun. D’autres dispositions visant à lutter contre les phénomènes d’érosion de la base imposable en matière d’impôt sur les bénéfices ont été intégrées : (a) un nouvel article 92 bis concernant la détermination des produits des entreprises vendant des marchandises cotées a été ajouté. Son objet est de déterminer les produits des sociétés extractives de manière objective par référence à la cotation des substances sur un marché officiel lorsqu’elle existe ; (b) un article 97A révisé propose une nouvelle règle visant à lutter contre la sous- capitalisation des entreprises en limitant la déduction des intérêts des sociétés sous- capitalisées. Désormais, la part des intérêts qui excède 15% du résultat retraité de l’entreprise emprunteuse doit être réintégrée dans le résultat imposable. Le résultat retraité s’entend du résultat net auquel sont ajoutés les charges d’intérêts déductibles, l’impôt sur les bénéfices et l’IMF (impôt minimum forfaitaire), les provisions pour dépréciation déductibles et les dotations aux amortissements déductibles ; (c) un nouvel article 97B révisé propose une définition élargie et plus précise de la notion d’entreprises liées ; (d) une révision des dispositions de l’article 100 introduit une limite à la déductibilité de certaines charges (redevances, prestations de services intra-groupe, achat auprès d’une centrale d’achat ou entité assimilée) ; (e) une définition des États ou territoires à la fiscalité privilégiée a été ajoutée à l’article 117 bis.
En ce qui concerne spécifiquement l’impôt sur les sociétés (IS), plusieurs points ont été précisés : (1) le régime des fusions a été précisé et les plus-values de la société absorbée sont exonérées d’IS ; (2) le crédit d’impôt accordé par la Guinée au titre des retenues à la source opérées à l’étranger ne peut désormais excéder le montant de la retenue à la source qui aurait été appliqué en Guinée si ces revenus avaient été de source guinéenne ; (3) une disposition similaire à celui existant aux articles 91-III et 91-IV du Code Minier a été introduite pour imposer en Guinée les plus-values réalisées sur les cessions directes ou indirectes de titres de participation des sociétés guinéennes détenues par des sociétés étrangères dans la mesure où les actifs cédés sont en Guinée. Par ailleurs le document de programmation budgétaire pluriannuelle 2022-2024 présenté au parlement en juin 2021 par le Ministre du Budget mentionne que le taux de croissance du secteur secondaire a été très robuste, se situant à 21,5% contre 7,2% en 2019, en lien avec la performance des activités extractives dont la croissance est passée de 9,4% en 2019 à 34,7% en 2020. Ce secteur extractif a contribué à la croissance du PIB à hauteur de 6,1%.
Cette performance est attribuable essentiellement au maintien du rythme de production de la bauxite par certaines sociétés minières, malgré la fermeture des frontières maritimes,
l’entrée en production de trois nouvelles sociétés à savoir CHALCO, AGB2A et ASHAPURA et à l’augmentation de la production artisanale de l’Or. Les exportations des biens et services ont connu une augmentation significative de 186,2% en 2020 contre une baisse de 4,4% en 2019, grâce à l’augmentation de la production bauxitique en lien avec la rentrée en production des nouvelles sociétés minières. En effet, les exportations sont passées de $US 2, 42 Milliards en 2019 à $US 3, 25 Milliards en 2020.
Quant aux exportations d’or, elles se sont situées à 3 232 millions $ en 2020 contre $US 1, 55 Milliards en 2019. Cependant, la situation financière établie par le gouvernement indique que la position nette du trésor public du système bancaire s’est détériorée de 35,5% par rapport à son niveau en 2019. L’endettement net du trésor à la banque centrale augmente de 18,9% dû à une progression plus marquée des dépenses de l’État par rapport aux recettes publiques. La dégradation de la position nette du trésor dans les banques commerciales résulte essentiellement des souscriptions nettes aux bons du trésor et aux emprunts obligataires sur la période.

Le même document enseigne que le taux d’inflation en moyenne annuelle est supposé se fixer à 10,9% en 2021 et à 9,4% en 2022 avant de se situer à 8,8% respectivement en 2022 et 2024. La maîtrise de ce taux autour d’un chiffre serait possible grâce à la poursuite de la mise des politiques budgétaires, monétaires et structurelles relatives à la production vivrière et d’autres actions prévues dans les documents stratégies nationales, notamment le PNDES 2021-2025 et la stratégie de lutte contre la COVID-19 (SNLC) 2020-2022. Sur la situation des finances publiques 2021, l’exécution globale des recettes du budget de l’État à fin mars se chiffre à GNF 5 072,91 Milliards sur une prévision annuelle en loi de finances initiale de GNF 23 511,64 Milliards, soit un taux d’exécution de 21,58%.
Le solde budgétaire de base à fin mars 2021 se chiffre à 514,44 milliards contre un objectif annuel de 360,54 milliards, soit 0,35% du PIB. Le solde de gestion est de 67,20 milliards pour une prévision trimestrielle de 139 milliards. Les dépenses d’investissement de la période se chiffrent à 785,34 milliards d’où un besoin de financement de 718,15 Milliards.
Les ressources de financement mobilisées au cours de la période se chiffrent à GNF 3 139,35 Milliards contre une prévision de GNF 1 701,92 Milliards. Elles se décomposent essentiellement en emprunts intérieurs pour GNF 2 030,31 Milliards dont GNF 155,54 Milliards de découvert exceptionnel de la banque centrale en faveur du trésor public et en emprunts extérieurs pour GNF 1 014,30 Milliards.
Les charges de financement se chiffrent à GNF 2 824,38 Milliards composées principalement du remboursement du capital des emprunts intérieurs pour GNF 2 608,53 Milliards, le remboursement du capital des emprunts extérieurs pour GNF 215,86 Milliards. Il faudra noter que le paiement des dépenses sur exercices antérieurs se chiffre à GNF 363,47 milliards.
Sur un autre registre, le 29 juin 2021, il a été créé sous l’autorité de l’ancien président Alpha Condé une cellule chargée du suivi du processus de notation financière en Guinée. Cette cellule a pour mission de conduire le processus permettant l’obtention de la notation financière inaugurale du pays et d’en assurer le suivi.
Cette cellule est chargée de travailler sur les conditions requises pour permettre à la Guinée l’accès aux marchés internationaux de capitaux et l’amélioration de la perception risque pays par les investisseurs internationaux.  A ce titre, la cellule est chargée d’élaborer un calendrier des travaux à conduire, de préparer la documentation nécessaire et d’affiner les données statistiques à fournir aux agences de notation, de recueillir les informations sur la dette publique et de proposer les améliorations à sa gestion, d’assurer le suivi avec les agences de notation jusqu’à la publication de la notation inaugurale.
Cette cellule est composée du président de la République ou son représentant qui assure le poste de président du comité de pilotage. Du Ministre de l’Économie et des Finances, vice-président du comité de pilotage, le Gouverneur de la Banque centrale, le Ministre du Plan et du développement économique, le Ministre du Budget, le Ministre chargé des investissements et des partenariats public-privé, le président du pool économique de la présidence de la République, le Coordinateur du comité technique de la cellule, Rapporteur du comité de pilotage. Les personnalités sont désignées pour  leurs compétences.